Comment l’équithérapie peut vous aider à retrouver un esprit tranquille ?

Les chevaux sont de précieux compagnons en psychothérapie parce qu’ils peuvent à la fois refléter le comportement humain et lui répondre. Et le plus important : « un cheval ne porte aucun jugement ».


C’est samedi soir, dans le centre-ville de Long Beach en Californie, on entend un rire qui vient des rues en contre-bas. Sarah Smith est allongée sur son lit, épluchant minutieusement ses notes de sociologie en vue de ses très prochains examens. Une guitare acoustique est posée contre son lit et un drapeau de couleur, symbole de la fierté homosexuelle, est épinglé juste à côté de son étagère de livres.

Au premier coup d’œil, Sarah donne l’impression d’être une étudiante ordinaire, mais ses yeux bleus et sérieux, trahissent parfois un passé fait de violence, d’abandon et de trauma émotionnel.

Sarah est née dans le service d’adoption d’un hôpital privé d’Orange County et dès l’âge de 3 ans, elle a été molestée par son instituteur à l’école maternelle. Dix-huit ans d’abus psychologiques et sexuels ont amené Sarah à l’âge adulte. Une enfance dévastée, ayant entrainé une incontrôlable consommation de drogue et une grande détresse psychologique.

Sarah a finalement échouée dans la rue devenant sans-abri à l’âge de 19 ans. Elle a trouvé refuge dans les voitures de ses amis et a utilisé les bains publics, jusqu’à ce que Pathways to Independence la recueille, la nourrisse, la soigne, la forme, et lui procure un endroit décent pour vivre. Cela fait maintenant 5 ans qu’elle est sobre et elle est proche d’obtenir son diplôme de sociologie avec mention (A) à l’université Cal-State Long Beach.

Il y a seulement deux ans on lui a diagnostiqué un cancer de la gorge et après une longue bataille contre la maladie elle peut espérer aujourd’hui une rémission complète.

equitherapie sarah

Afin de lutter contre son manque d’estime de soi, de confiance en soi et envers les autres, Sarah s’est inscrite à un programme d’équithérapie.

Les chevaux sont de précieux compagnons pour la psychothérapie parce qu’ils peuvent à la fois refléter le comportement humain et lui répondre.

En tant qu’animaux d’élevage, les chevaux ont une sensibilité aigüe vis à vis des données sensorielles humaines telles que le sentiment de sécurité ou de danger. Ils peuvent également entendre le battement du cœur humain et des recherches sur la variation du rythme cardiaque des chevaux, montrent qu’ils sont capables de synchroniser parfaitement leurs propres battements de cœur avec celui des humains.

Lorsque des personnes sont présentées au troupeau pour la thérapie, les chevaux répondent physiquement et émotionnellement dans le même spectre comportemental que celui des personnes présentes, donnant aux médecins un aperçu de la psychologie intérieure de leur patient.

Les nuages étaient très bas au-dessus des écuries du Centre équestre Ortega de San Juan Capistrano, et dans l’enclos principal, un troupeau de trois juments, offertes par l’ONG Otra Mas, attendaient l’arrivée de Sarah.

La directrice du programme, Carol Caddes, est une « amoureuse » des chevaux et une thérapeute conjugale et familiale reconnue, avec plus de 20 ans d’expérience.

Sarah quant à elle avait très peu d’expérience avec les chevaux et n’avait jamais connu d’autre forme de traitement émotionnel que les médicaments et les traditionnelles discussions sur le sofa d’un thérapeute.

Le regard fixe, Sarah cherchait celui de chaque cheval. Elle établit une connexion presque immédiate avec Madonna, une jument âgée de 20 ans, formée par Carol Rose, une cowgirl du Texas. Carol Caddes guida Sarah dans un exercice sensoriel : tourner autour de Madonna les yeux fermés mettant ainsi au défi « sa zone de confort ».

Il est normal de se sentir intimidé par la taille imposante et le pouvoir des chevaux. Pesant jusqu’à 1 tonne, ils peuvent devenir des métaphores pour traiter les peurs liées à la vie personnelle des patients. Comme Sarah avait développé sa confiance en elle, elle contrôla avec plus d’assurance le troupeau en menant Madonna sans l’aide d’une longe ou d’une cravache – une méthode instinctive utilisée par les troupeaux pour se diriger les uns les autres.

« J’étais un peu sceptique au premier abord, et j’ai trouvé ces chevaux très intimidants. Je ne savais pas ce qui allait m’arriver. Je n‘attendais rien de particulier … J’ai regardé Madonna dans les yeux et je me suis sentie immédiatement en confiance avec elle. L’exercice sensoriel fut très agréable, un peu effrayant, mais il a comblé un vide entre moi et la jument, » a expliqué Sarah.

therapie cheval

La thérapie est réalisée sans selle et les chevaux ont la liberté de répondre comme ils le souhaitent. Carol Caddles pense « qu’on obtient une réponse plus authentique en donnant plus de liberté au cheval. C’est incroyable d’être sur le dos d’un cheval mais c’est tout aussi beau d’être leur compagnon de promenade quand ils choisissent de vous suivre ».

Carol a son propre modèle de thérapie physiologique, en observant la dilatation des pupilles, la fréquence cardiaque, le langage du corps et la gestuelle au jour le jour. Son rôle était de guider sans risque Sarah grâce à une série d’activités au sol qui les gardaient, elle et le cheval, dans une fenêtre thérapeutique d’éveil – « s’ils vont trop loin trop vite, le patient lâchera prise et le cheval paniquera, s’ils ne vont pas assez loin ensemble, ils pourront ressentir un sentiment de dépression ou d’abandon ».

Au début de la deuxième session de thérapie, Sarah trouva les chevaux beaucoup moins intimidants. Carol Caddles demanda alors à Sarah de choisir un appui vertical et de symboliser un aspect de sa vie. Sarah démêla un petit parachute coloré qui représentait la confiance qu’elle avait en l’école. Elle laissa le parachute s’envoler et il se posa au milieu de l’enclos, mais Madonna ne bougea pas. A l’inverse, un poney noir et blanc âgé de 9 ans nommé Chips, commença à examiner le parachute.

D’un mouvement de tête et d’un coup de sabot, le poney sauvage se sauva inopinément de l’autre côté de l’enclos, paniqué, les narines dilatées, laissant Sarah abandonnée sur son île de tissu au milieu de la large carrière.

« Chips a eu peur, je ne sais pas ce qui s’est passé, mais cela m’a rappelé mon enfance. Je suis allé la réconforter et je lui ai dit que jamais je ne le blesserais. »

chips parachute

Prenant son courage à deux mains, elle s’est approchée à nouveau de Chips et a doucement caressé la crinière du poney. Elle a été submergée par l’émotion et des larmes ont coulé doucement le long de son visage.

Chips a gentiment « flairé » Sarah, lui permettant ainsi d’être pleinement connectée avec lui et de revivre son trauma sans être emportée par un tourbillon d’émotions.

« J’ai vu en Chips comme dans un enfant, je pleurais de manière hystérique, un profond chagrin, j’ai ressenti à la fois un sentiment de protection et de tristesse. Le poney m’a permis de ressentir cela et m’a réconforté lorsque j’étais émotionnellement vulnérable ».

Durant sa troisième et dernière session, Sarah mena Chips et Madonna des écuries à l’enclos, et divisa cet espace thérapeutique en trois parties représentant son passé, son présent et son futur. Ce fut un moment très calme, Sarah prit une respiration profonde, relaxa ses épaules et commença à marcher avec assurance, entrainant Madonna dans une promenade, côte à côte, épaule contre épaule.

« C’était invraisemblable, je n’avais jamais pensé que je pourrais avoir cette connexion émotionnelle avec un cheval. C’était comme si je m’étais fait un ami, et que l’on se comprenait. Ça m’a permis de vraiment comprendre ce que je ressentais à l’intérieur. Quand on a été blessé, il est parfois compliqué de se retrouver avec d’autres personnes, mais avec un cheval c’est différent il n’y a aucun jugement de sa part. »

Elle expliqua que « revivre son enfance » avec des chevaux l’a forcé à laisser sa douleur derrière elle, lui permettant d’identifier la personne qu’elle souhaitait devenir. Grâce à ce programme, Sarah nota également une amélioration considérable dans sa manière de communiquer et sa confiance en elle.

Réfléchissant à l’expérience qu’elle venait de vivre, Sarah, qui avait peur des chevaux, fut incapable d’expliquer à quel point ce programme lui avait été bénéfique. « Parfois il n’y a pas de mots pour exprimer ce que l’on ressent » a-t-elle dit avec un sourire.

Faire de l’équithérapie en France :

Notre écurie préférée : Ecurie de la Borde

E=M6 consacré à l’équithérapie


Source : theguardian.com